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Club de lecture – Lundi 8 novembre 2021 de 14h à 15h30

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Club de lecture

Lundi 8 novembre de 14h à 15h30

 
À l’initiative d’une de nos lectrices, un club de lecture adultes s’est formé à la Bibliothèque.

 
Il se réunit tous les mois, pour échanger pistes, idées de titres, coups de cœur, lectures d’extraits…

 

Compte-rendu du club de lecture du 11 octobre 2021

Anne-Françoise avait envie de présenter une autrice, Carmen Posadas, Uruguayenne née en 1953. Elle a vécu à Madrid, à Buenos Aires, à Moscou. Elle a d’abord écrit des livres jeunesse, ensuite des thrillers. Pour l’instant elle narre, sur base de faits historiques, des épisodes de la vie espagnole d’aujourd’hui ou d’hier, de la Russie Tsariste, de la révolution française, en mettant en avant des personnages savoureux ayant réellement vécu et ceux qu’ils ont dû rencontrer à leur époque. C’est toujours plein d’humour. Tous les ouvrages n’ont pas été traduits en français. Comme thriller, les Petites infamies, sont savoureuses ; un cuisinier retrouvé mort congelé dans une chambre froide, lors d’un dîner qui rassemble dans une maison isolée une trentaine de convives. Le ruban rouge, sur la révolution française vécue par une dame du monde qui a entretenu des relations avec les différentes forces en présence. Le témoin invisible sur la fin du Tsar de Russie et sa famille, le personnage principal est un jeune chargé de l’entretien des systèmes de chauffage des palais, témoin par les ouvertures dans les plafonds, du vécu de la famille du Tsar. Malheureusement, La hija de Cayetana n’a pas été traduit en français ; l’adoption par Cayetana la duchesse d’Albe, d’une fille d’esclave noire, au temps de Charles IV et de Goya.

Marina A, d’Eric Fottorino (présenté par Geneviève). Le docteur Gachet, sa femme et sa fille découvrent les charmes de la ville de Florence. Une exposition de Marina Abramovic, performeuse serbe, par son « Body Art » perturbe leur séjour. Avec son compagnon Ulay, allemand, 43 ans, elle essaye d’exprimer une recherche d’harmonie en nouant sa chevelure à la sienne, en l’enlaçant jusqu’à l’étouffer. L’œuvre « L’impossible rapprochement » montre deux êtres qui voudraient se toucher mais en sont empêchés et restent à distance l’un de l’autre en vue de protéger l’autre. Cette exposition pose la question : Comment peut-on déshumaniser quelqu’un qui ne se défend pas ? Comment des gens normaux peuvent devenir très violents en public, si on leur en donne la possibilité ? Par différents objets au choix (boa, fleur, fer, …) elle montre comment passer de la délicatesse à la cruauté. Comment l’art qui dérange, par l’usage du corps, peut pousser au danger. Pour elle, c’est une rébellion contre son éducation stricte mais aussi contre la culture répressive de la Yougoslavie d’après-guerre. Ensemble, ils donnent une vision de l’humanité qui est simultanément bourreau et victime d’elle-même. Enfin, Eric Fottorino fait référence tout au long de son roman à des artistes, écrivains, films comme The square de Ruben Östlund (ne pas se toucher sauf du regard, prendre soin de son semblable), mais aussi le peintre Hopper. Pour Fottorino, Hopper interpelle mais ne touche pas, il reste à la surface dans sa peinture comme une mouche sur une vitre. Marina A, c’est différent, va en profondeur… Son point de vue, ici, reste subjectif.

Là où chantent les écrevisses, de Delia Owens (présenté par Geneviève). « La douleur qu’elle avait au cœur s’écoula comme de l’eau dans le sable. Elle était toujours là, mais cachée au plus profond. Elle posa la main sur la terre mouillée et vivante, et le marais devint sa mère. » Kya se retrouve seule et vit dans le marais… Cela se passe en Caroline du Nord. Livre profond abordant plusieurs thèmes : l’abandon, la solitude et la pauvreté mais aussi la découverte de la nature dans toute sa splendeur, le don de soi et la promesse unique dans l’amour, l’amitié profonde, la justice, La poésie.

Les délices de Tokyo, de Durian Sukegawa (présenté par Odette). Sentaro, repris de justice, a été embauché comme gérant d’une échoppe, le Dorayaki, du nom d’une pâtisserie japonaise. Il accepte d’embaucher la vieille Tokue qui réussit si bien le an, la pâte de haricot rouge qui accompagne les dorayaki, et le chiffre d’affaires double du jour au lendemain. Mais Tokue cache un secret. Avec beaucoup de douceur et de tendresse, l’auteur nous décrit les liens qui unissent Sentaro et Tokue et l’enseignement de cette dernière sur les sens, la perception de la nature aussi. Lu sur Babelio : « Un récit touchant et poétique, d’une sensualité palpable et émouvante, autour de l’amour de la cuisine, la souffrance des corps et des cœurs, la honte, la solitude, la résilience. »

La Virginienne, de Barbara Chase-Riboud (présenté par Odette). L’une des plus grandes histoires d’amour de l’Amérique est aussi l’une des moins connues et des plus controversées. Thomas Jefferson, le troisième président des Etats-Unis et l’auteur de la Déclaration d’Indépendance, eut pendant trente-huit ans une maîtresse, la belle Sally Hemings, qu’il aima et avec laquelle il vécut jusqu’à sa propre mort à l’abri des murs de Monticello, la plantation qu’il possédait en Virginie. Mais ce qui choqua ses contemporains ne fut pas simplement que Jefferson eût une maîtresse. Le vrai scandale vint de ce que Sally Hemings était une esclave quarteronne et de ce que Jefferson engendra avec elle une famille d’esclaves dont de nombreux descendants, connus et inconnus, vivent de nos jours. Cette liaison passionnée commença dans le Paris de 1787, où Jefferson était ambassadeur de la jeune république américaine auprès de la Cour. Sally n’avait pas alors plus de quinze ans (l’âge de la fille de Jefferson devenu veuf des années auparavant). Du royaume de France, ce récit romantique entraîne le lecteur dans les antichambres du pouvoir à Philadelphie et Washington, puis le fait participer à la vie quotidienne, à la magnificence de Monticello. Pour recréer cette « love story », Barbara Chase-Riboud s’est basée sur les documents et témoignages d’époque, tout en lâchant la bride à son imagination de romancière. Elle a brossé ainsi un étonnant tableau de l’Amérique esclavagiste de la fin du XVIIIe siècle, une fresque toujours fidèle aux données de l’Histoire : Elle raconte la vie dans une plantation, avec les liens entre esclaves et maîtres, où tous se mélangent. Malgré l’affection de certains maîtres pour leurs esclaves (qui sont parfois leurs frères ou sœurs ou enfants), la haine se mêle à l’amour et ces sentiments ambigus sont parfois incompris par les uns ou les autres. Les esclaves sont noirs, café au lait et même carrément blancs lorsque seul un des arrières grands-parents est africain. Les enfants de Jefferson et Sally sont blancs et pourtant esclaves. Une plantation est une grande famille !

Entre ciel et terre, de Jón Kalman Stefánsson, romancier, poète et traducteur islandais (présenté par Edith). « Certains mots sont probablement aptes à changer le monde, ils ont le pouvoir de nous consoler et de sécher nos larmes. Certains mots sont des balles de fusil, d’autres des notes de violon. Certains mots sont capables de faire fondre la glace qui nous enserre le cœur et il est même possible de les dépêcher comme des cohortes de sauveteurs quand les jours sont contraires. » Parfois, à cause des mots, on meurt de froid. Comme Bárður, pêcheur à la morue islandais, parti en mer sans sa vareuse, trop occupé à retenir les vers du Paradis perdu, du grand poète anglais Milton, Quand, de retour sur la terre ferme, ses camarades sortent du bateau le cadavre gelé de Bárður, son meilleur ami, appelé le gamin tout au long du roman, entame un périlleux voyage à travers l’île pour rendre à son propriétaire, un vieux capitaine devenu aveugle, ce livre dans lequel Bárður s’était fatalement plongé. Pour savoir aussi s’il a encore la force et l’envie de continuer à vivre. Le gamin n’est pas fait pour être marin, il est fait pour la beauté des mots, la magie de la poésie. Il est envoûté par le pouvoir des vers, qui lui font découvrir un ailleurs, autre chose que le labeur et la douleur. La vie est rude pour le gamin. Son chemin le mènera vers un abri, un foyer, où d’autres comme lui connaissent les ténèbres de l’existence. C’est une histoire qui nous parle de douleur et d’amitié, de lumière et de ténèbres, de gens qui oscillent entre la vie et la mort. Une très belle découverte. Magnifiquement écrit.

Autre coup de cœur avec Rien n’est noir, de Claire Berest. « À force de vouloir m’abriter en toi, j’ai perdu de vue que c’était toi, l’orage. Que c’est de toi que j’aurais dû vouloir m’abriter. Mais qui a envie de vivre abrité des orages ? Et tout ça n’est pas triste, mi amor, parce que rien n’est noir, absolument rien. » Frida Kahlo parle haut et fort, avec son corps fracassé par un accident de bus et ses manières excessives d’inviter la muerte et la vida dans chacun de ses gestes. Elle jure comme un charretier, boit des trempées de tequila, et elle ne voit pas où est le problème. Elle aime les manifestations politiques, mettre des fleurs dans les cheveux, parler de sexe crûment, et les fêtes à réveiller les squelettes. Et elle peint. Frida aime par-dessus tout Diego, le peintre le plus célèbre du Mexique, son crapaud insatiable, fatal séducteur, qui couvre les murs de fresques gigantesques.

Joy Sorman est une journaliste et romancière française (présentée par Cécile). Son dernier livre, À la folie, conte une expérience qu’elle a faite durant deux ans, à savoir se rendre tous les quinze jours dans le pavillon d’un hôpital psychiatrique où sont soignées les personnes internées là contre leur volonté, parce que représentant un danger pour elles-mêmes et/ou pour les autres. Je pense que ce récit peut intéresser tout le monde : ceux qui travaillent dans ce milieu, certainement, mais aussi les personnes qui n’ont pas de lien personnel, familial ou amical avec ces problèmes, tout comme ceux que ça effraie, et je peux imaginer que ceux qui vivent ces souffrances peuvent s’y sentir reconnus. En partageant un peu la vie de ces personnes Joy Sorman a pu voir leur détresse et leur humour, leur besoin d’amour et leur incapacité à le vivre, leur désir et leur difficulté à se faire une place « à l’extérieur », tout ce qu’elles nous disent de nous… Elle a pu trouver la distance nécessaire à respecter, elle est discrète, empathique, parfois agacée, décontenancée, elle ne se met pas à la place des soignants, ne juge pas. Et de plus elle écrit très bien !

Rendez-vous à la bibliothèque le lundi 8 novembre de 14h à 15h30.
Vous êtes les bienvenu(e)s même si vous n’avez pas de livre à présenter.

A bientôt,
Bonnes lectures !

Anne-Françoise et Edith


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